Interview: Maxime Sanchez, jeune réalisateur
Photo: Lou-Anne Dubos

Il est jeune, décontracté et il transpire l’amour du cinéma: à l’occasion du 5ème festival “Vision d’Histoire”, le réalisateur Maxime Sanchez était à l’honneur avec la diffusion de son court-métrage “Maginot”, mais aussi en prenant régulièrement la parole pour présenter les œuvres cultes qui ont rythmé le week-end. Au pupitre, une chose est sûre: le cinéaste en herbe est habité d’un feu sacré pour le septième art, une flamme qu’on reconnaît immédiatement, celle de la passion. Bien décidé à se créer sa chance en investissant son propre argent dans le tournage de son prochain film “Filmmaker”, Maxime Sanchez a une carte à jouer et il a bien raison: son talent mérite toute notre attention. Il nous a fait l’amitié de répondre à quelques questions autour de “Maginot”, de son prochain long-métrage et aussi du cinéma en général.

Les Réfracteurs: Alors on a une question traditionnelle au début, quel film te ressemble le plus et lequel t’aurais aimé faire?

Maxime Sanchez: C’est une question très difficile, le film qui me ressemble le plus… Alors, je vais déjà répondre à la question “le film que j’aurais aimé faire”: c’est « First Man » de Damien Chazelle qui est sorti en 2018. J’avais un autre film préféré avant et “First Man” est sorti et c’est devenu mon film préféré instantanément.

Pour le côté historique ?

Les deux, la mise en scène que je trouve brillante… Déjà, Damien Chazelle est je trouve un des meilleurs metteurs en scène de la nouvelle génération. L’histoire de la conquête spatiale m’intéresse, la Guerre Froide m’intéresse. Ryan Gosling et Claire Foy, les deux ensemble marchent super bien. Et puis la reproduction de l’époque, et tout, enfin tout est bon! C’est le film que j’aurais aimé faire, et je l’aurais fait de manière parfaite. Bien humblement, j’aurais essayé avec les mêmes intentions je veux dire. (rires)

Chazelle a toujours un sens de la musique incroyable.

Bien sûr, l’utilisation de la musique est incroyable, c’est vraiment spectaculaire. Sinon, le film qui me ressemble le plus, c’est très dur… J’aurais envie de dire “First Man” aussi, c’est à la fois un peu intime et ça essaie d’être spectaculaire et sensible. Je vais garder “First Man”.

Pour revenir à “Maginot”, on se demandait si en ayant grandi à Verdun, même si tu n’es pas le scénariste du court-métrage, c’était un devoir d’évoquer la guerre ? Est-ce qu’on a un devoir de mémoire ?

Alors… est-ce qu’on a un devoir, je ne sais pas. En tout cas, dans mon cas j’en ai envie. Je ne sais pas si c’est mon devoir, reste que je prépare dans mes tiroirs un film sur Verdun, que j’espère faire quand j’aurai le budget parce que vous avez vu ce que je peux faire en 5 minutes avec 0€, là je veux de l’argent (sourire). Mais ouais, je prépare un film sur la bataille de Verdun, les forts, tout ça… À mon sens, je me dis que légitimement, j’aimerais bien le réaliser, quelqu’un de Verdun qui le mette en scène, ce serait cool. Donc je sais pas si c’est un devoir, en tout cas j’en voudrais pas à d’autres réalisateurs ou d’autres artistes du coin de ne pas le faire: après tout, faut quand même s’y intéresser à la guerre, c’est compliqué, c’est dense, il y a beaucoup de choses à savoir. Dans mon cas, j’aimerais que légitimement, on me laisse raconter cette histoire.

Tu nous as fait part des difficultés de tournage pour “Maginot”, notamment pour les lumières, en système D. Pourtant on a été scotché par cet aspect du court-métrage.

Merci beaucoup. Beaucoup de réalisateurs disent que c’est dans la contrainte qu’on devient créatif. Dans mon cas, j’en ai un peu marre de certaines contraintes (rires). Mais reste qu’effectivement, on est très créatif dans la contrainte.

Quel était ton intention première avec ton premier court? Tu fais tourner la caméra pour la première fois, qu’est-ce que tu te dis? Quelle idée était vraiment le moteur?

A propos de “Maginot” ? Parce que c’était pas mon premier court-métrage, c’était mon film de fin d’année d’études qui était réalisé autour d’un thème imposé. Par contre, je peux vous parler de mon premier court-métrage: c’était un fan-film sur Harry Potter. À la base, c’était un pari entre amis, ça faisait un moment qu’on animait ensemble une émission sur Harry Potter. Au bout d’un moment, on a eu envie de se lancer un défi un peu plus difficile qui prend du temps et de l’argent. On était tous passionnés de cinéma, dans l’équipe de 7, on était 3 à vouloir travailler dans le cinéma. On s’est dit “on va se lancer là-dedans”. C’est un défi énorme quand t’as pas de budget: les effets spéciaux, devoir trouver une histoire qui fonctionne… La première étape a été de trouver les droits d’adaptation. On les a obtenus de la Warner pour pouvoir adapter ça, faire ça dans les règles. Ensuite, avec 800€ on a fait un 45 minutes sur Harry Potter., donc quand même pas trop simple (rires). En fait, ce court-métrage représente comme “Maginot” le système D à fond, et c’est un peu de ça aussi que vient l’envie le long-métrage que je suis en train de préparer, c’est de montrer le système D des jeunes réalisateurs parce que ça me fascine. Cette manière qu’on a de mettre en scène avec peu de choses, je trouve que c’est vraiment là aussi qu’on s’améliore en tant que réalisateur. Du coup, l’envie avec mon premier court c’était comme je l’évoquais plus tôt de proposer quelque chose de divertissant mais aussi d’assez intime, ce qui est pour moi le cas avec la saga Harry Potter qui mêle parfaitement les deux genres. Dans mon cas, c’était l’envie très vite de se dire “je suis français, je suis très jeune, je connais pas de producteurs mais j’ai quand même envie de faire du cinéma hollywoodien, c’est ça que je veux faire et je vais le faire à ma manière”.

Se donner les moyens…

Voilà, on a jamais été trop observateurs des limites. À l’époque un peu, parce qu’on avait pas trop de budget mais pour “Filmmaker”, le long-métrage que je prépare, j’ai cédé à tous mes caprices. C’est-à-dire que j’ai dit “je veux la jungle”, on va aller dans la jungle! On va trouver toutes les solutions mais on va le faire.

Qu’est ce que tu retiens de “Maginot”, en bien et en mal?

En mal, je déteste jouer: je l’ai fait par obligation parce qu’il fallait faire vite et aussi parce qu’on se ressemblait un peu avec mon partenaire donc ça fonctionnait pour faire deux frères. Mais j’ai horreur de mon jeu, ce n’est pas ce que j’aime. Par contre je retiens la photo, je trouve qu’on a réussi quelques plans assez jolis dans la forêt. J’aime bien le plan où on arrive dans le tunnel par exemple, je trouve qu’il découpe bien les silhouettes, il rend bien.

On confirme (sourire). Grâce à “Maginot”, tu as réussi à constituer une équipe? C’est le moment de balancer quelques noms et de l’amour.

Bien sûr! Valentin Belleville qui m’accompagne à l’écran et qui est le scénariste du film. On collabore toujours ensemble, d’ailleurs il m’a accompagné au Vietnam pour faire les repérages de “Filmmaker”. Il n’est pas directement intégré dans l’équipe créative parce qu’il est sur ses propres projets, ce qui lui prend aussi beaucoup de temps, mais on essaye de s’accompagner au moins moralement en permanence. Sinon le chef-opérateur de “Maginot”, Corentin Letessier qui a fait lui des études pour devenir vraiment directeur photo et qui termine son cursus à Rennes. Il travaille extrêmement bien aussi, il est le chef-opérateur de Valentin, moi j’en ai un autre parce qu’au niveau des plannings c’est trop compliqué sinon. Mais oui, toute cette équipe-là, je collabore toujours avec, on a d’autres projets ensemble et ça ne s’arrêtera sûrement jamais: on a tous ce même désir de faire ce cinéma un peu hollywoodien chez nous.

Pour la suite, tu nous emmènes où, vers quel univers? On a pu voir quelques images de “Filmmaker” qui a l’air de beaucoup s’inspirer du tournage de “Apocalypse Now”, tu te diriges aussi vers d’autres genres?

Pour le moment, dans ce que je fais, on se rapproche beaucoup plus du côté divertissement et spectaculaire. C’est le cas pour “Filmmaker”, c’est un film qui est d’apparence un long-métrage de divertissement, mais qui est en fait une oeuvre très intime. On développe beaucoup les relations entre les personnages, on y parle aussi de la génération d’artistes dont moi je fais partie, où c’est très difficile de trouver du travail. On est nombreux à arriver à la fac ou dans les écoles de cinéma et on est au final très peu derrière à arriver à vivre de ce métier-là. J’avais vraiment envie de parler de ces sujets, c’est des thèmes qui me touchent. Ça parle aussi des sacrifices qu’on fait en tant qu’artiste: sacrifices personnels, sacrifices financiers… Des risques qu’on prend, parfois inconsidérés. C’est des thématiques beaucoup plus intimes et c’est un peu en rapport d’ailleurs avec “First Man” qui m’avait beaucoup marqué: c’est important de mêler cela. Donc en fait, “Filmmaker” va aussi être un drame au-delà du film d’aventure.

Et du coup, quand tu seras ultra connu, avec qui tu rêves de collaborer?

C’est une excellente question. Essentiellement des comédiens, j’ai ma petite liste d’acteurs que je rêverais de faire tourner. Numéro un: Tom Hanks, c’est mon acteur préféré, j’adorerais le faire jouer. Dans les plus jeunes, il y a un comédien que j’adore, c’est Adam Driver (exultation commune). Dans “Marriage Story”, il était vraiment exceptionnel, j’adorerais le diriger.

En bonus, un petit lien vers le teaser de « Filmmarker »: ici
Toutes les dernières infos sont sur la page Facebook du film: ici

Nicolas Marquis

Retrouvez moi sur Twitter: @RefracteursSpik

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