The Nightingale

2018

de: Jennifer Kent

avec: Aisling FranciosiBaykali GanambarSam Claffin

Australie, début du 19ème siècle : à la suite d’un acte d’une violence extrême, Clare, une jeune femme d’origine Irlandaise, se lance à la poursuite d’un groupe de soldats anglais pour obtenir vengeance. En chemin, elle loue les services de Billy, un aborigène, pour la guider jusqu’à destination.

Et avant de poursuivre, il est bon de préciser que lorsque l’on parle de violence extrême, on pèse nos mots. On n’a pas froid aux yeux chez les réfracteurs, et pourtant cette scène reste parmi les plus traumatisantes que l’on ait vu récemment. A tel point que nombre de spectateurs auront bien du mal à ne pas détourner le regard de dégoût. Cette violence, brute et souvent inopinée va être parsemée tout au long du film, souvent comme élément narratif, tel de véritables coups de poings. Jamais gratuite, elle reste omniprésente, même passé la fameuse scène du début, telle une épée de Damocles perpétuelle. Âmes sensibles s’abstenir, clairement !

Deuxième précision: avant d’aborder “The Nightingale”, quelques notions d’histoire s’imposent, en particulier sur la colonisation de l’Australie. Peu de temps après avoir posé le pied en terre australienne, la Grande-Bretagne va rapidement y expédier d’une part, un bon nombre de soldats, et en général les moins recommandables, mais aussi utiliser ces nouvelles terres pour désengorger les prisons, en envoyant les condamnés aux travaux forcés, sans distinctions entre prisonniers politiques et fripouilles en tout genre. Ajoutez à cela un massacre à peine caché des aborigènes, et vous aurez une idée du capharnaüm de l’époque. Prisonnière, c’est d’ailleurs la condition de Clare quand elle arrive en Australie, et bien que sa peine soit purgée au début du film, elle reste à la merci des soldats britanniques, notamment du sadique lieutenant Hawkins, celui par qui la tragédie familiale qui frappe la jeune femme arrive.

Trop souvent on se retrouve face à des “films d’époque” qui alignent les dollars en costume et décors, et pourtant il en ressort une impression de factice. Ici c’est exactement l’opposé: “The Nightingale” reconstitue assez bien l’Australie du 19ème siècle, ses habitants couverts de crasse après leur dur labeur, le langage châtié des soldats, ou encore la jungle tasmanienne. Niveau authenticité, le pari est réussi.

Maintenant que le décor est planté, penchons nous sur le contenu. L’une des premières choses que l’on retient du film, c’est la performance d’actrice d’ Aisling Franciosi. Régulièrement sur le fil du rasoir entre revanche et folie, elle réussit à porter le scénario sur ses épaules.

Nightingale

« Le café du matin, c’est sacré ! »

Sa dynamique avec Baykali Ganambar (Billy) est plutôt bonne même si on regrette qu’elle soit un peu convenue. Rien de très surprenant: d’abord opposé par leurs différences, ils finissent progressivement par se connaître et même faire naître une relation forte. Du déja-vu, ni mal amené ni incongru, mais déjà vu quand même. En résulte tout de même une conclusion logique, dans le fil du film.

Le personnage de Billy, l’aborigène, est évidemment l’occasion de donner une critique acerbe de la colonisation et du massacre des natifs australiens. Privé de toute décence par les britanniques, il est obligé de vivre grâce aux maigres piécettes qu’il réussit à glaner. Une réflexion elle aussi attendue mais pas inintéressante.

Et dans ce film de revanche, aux allures de road movie, on exprimera sans doute plus de réserve sur le personnage de Hawkins (Sam Claffin). Passé les premiers chocs de ses élans sadiques, il tombe peu à peu dans la caricature du bourreau. Des trois, c’est sans doute le moins convaincant, du moins dans l’écriture.

Reste derrière cette fresque historique qui peine parfois à trouver de l’originalité, quelque chose de très contemporain autour de la place de la femme dans la société. Alors on ira pas jusqu’à dire que “The Nightingale” est un film féministe, mais toutefois, il en porte quelques combats moderne légitime. Peut être tout simplement parce que derrière la caméra on retrouve une femme: Jennifer Kent. Parfois pour avoir un message pertinent, il suffit de s’adresser aux premiers concernés.

​​7000

Sans erreur majeure, et en se démarquant grâce à son contexte historique, “The Nightingale” reste un film globalement réussi. Il laissera quand même derrière lui quelques petits défauts parfois agaçants: un deuxième tiers un peu longuet, et surtout un récit trop balisé.

Nicolas Marquis

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