(The Cabin in the Woods)
2011
de: Drew Goddard
avec: Kristen Connolly, Chris Hemsworth, Anna Hutchison
Très régulièrement, on vous livre nos interprétations personnelles sur les films que nous parcourons en invoquant ce qu’on désigne sous le terme “second niveau de lecture”. Le message d’un long-métrage est rarement dans le déroulé des faits mais davantage dans les réflexions qu’on a autour de l’œuvre. Pourtant, il arrive que ce stade supérieur d’assimilation de la pellicule soit très concret, visible. On embarque aujourd’hui pour “La cabane dans les bois”, un de ces films qui fait le pari de clarté totale dans son message.
Son histoire mêle deux intrigues en une seule. D’un côté, du classique: 5 amis de fac ricains embarquent pour un week-end dans un chalet perdu dans la cambrousse. Sur place, ils vont devoir lutter pour leur survie alors que les événements paranormaux se succèdent: du déjà-vu total, rempli de clichés très volontaires. D’un autre côté, à l’intérieur d’un centre de contrôle mystérieux, des hommes et des femmes s’affairent pour déclencher les horreurs que vont affronter les 5 comparses. En actionnant boutons et leviers, les employés de ce laboratoire étrange condamnent un à un nos héros par leur intervention discrète. Deux films suffisamment entrelacés pour qu’ils forment un tout cohérent mais qui mélange les sentiments.
« La cabane dans les bois” sait à qui il s’adresse. En multipliant les clins-d’œil aux films d’horreur devenus cultes, comme “Vendredi 13” ou “Evil Dead” pour citer les plus évidents, il ressort une impression de complicité avec l’œuvre. On comprend tous ces petits hommages et on les savoure car ils nous parlent, pour peu qu’on soit un peu ouvert aux films d’angoisse.
Pour mieux faire admettre ces deux intrigues, le long-métrage va faire preuve d’une bonne dose de second degré. Bien sûr, c’est de l’humour noir, mais n’en reste pas moins que “La cabane dans les bois” est un film foncièrement drôle. Chaque intervention des laborantins est l’occasion de désamorcer des situations totalement clichées avec humour.
« Entre deux études de l’œuvre de Shakespeare »
Ce qui permet à l’oeuvre de se reposer sur une grammaire de l’horreur classique mais efficace. Jumpscares en pagaille et situations saugrenues se retrouvent forcément justifiés par l’intrigue et “La cabane dans les bois” ne se gêne pas pour s’appuyer dessus avec un certain savoir faire. C’est un film d’amoureux du cinéma de genre, comme nous.
On regrettera toutefois le background de la base scientifique: pas franchement utile et pas du tout original, il apparaît comme superflu. Rester dans le flou aurait pu être judicieux. Ne pas avoir toutes les clés immédiatement incite à aller plus loin et participe au côté addictif du long-métrage, mais on fait un pas de trop dans l’explication finale et on aurait parfaitement admis une part de mystère plus profonde.
D’autant plus que le laboratoire vaut davantage pour sa critique du monde du 7ème art que par son explication concrète. En actionnant les manettes qui provoquent des réactions étranges dans le chalet, c’est avec beaucoup de recul que “La cabane dans les bois” met en abîme le cinéma. Tous les échanges des responsables du massacre ressemblent aux propos que pourraient tenir des producteurs de films de genre. Un côté grinçant qui donne une dimension attachante au tout.
Ce procédé rend le film reposant: son second niveau de lecture qu’on évoquait en intro est accessible et évident. Une fois de temps en temps (pas trop mais quelques fois), c’est agréable de se retrouver face à un long-métrage aux influences claires et assumées. “La cabane dans les bois” ne se camoufle pas, c’est ouvertement qu’il affirme son amour du “cinéma bis”, et tant mieux car on partage son affection.
“La cabane dans les bois” est à la fois un film fun et renferme dans le même temps un deuxième niveau de digestion qui flatte les cinéphiles. De quoi nous satisfaire et nous faire sourire de manière complice.