Vivarium

2019

de: Lorcan Finnegan

avec: Imogen PootsJesse Eisenberg

Amis du fantastique, du farfelu et du bizarroïde, bonjour! Vos Réfracteurs, jamais en manque de curiosités cinématographiques, se penchent aujourd’hui sur le très étrange “Vivarium”. Encore un de ces films dont l’exploitation en salles a été contrariée par l’épidémie de Covid-19 (décidemment il va falloir s’y habituer) et qui se voit donc lui aussi bénéficier d’une sortie en VOD avancée. Dans l’embouteillage de ces commercialisations précoces, qui nous donne pas mal de boulot, l’ambiance mystérieuse de ce film nous a interpellée. On active donc nos méninges pour réfracter ce long-métrage au style singulier.

Gemma et Tom (interprétés respectivement par Imogen Poots et Jesse Eisenberg) forment un jeune couple en quête d’une maison pour s’installer ensemble. À la faveur d’une visite au sein d’un gigantesque lotissement aux centaines de logements identiques, et désert de tout habitant, ils vont se retrouver prisonniers dans ce dédale, leurs pas les ramenant mystérieusement en permanence vers le logis qu’ils étaient venus admirer. Chaque jour un colis de nourriture est déposé devant leur porte, sans jamais qu’ils ne puissent apercevoir le livreur. Un matin, le carton quotidien va contenir un bébé, avec l’ordre pour le jeune couple de l’élever.

Avec ce résumé vous aurez probablement deviné que “Vivarium” est une vraie curiosité. Tout ce contexte sert en fait à dérouler une métaphore géante sur la vie de couple et la parentalité, ainsi que la pression sociale qui pèse sur les jeunes amoureux afin qu’ils se conforment à cette vision étriquée de la famille. “Vivarium” va s’appuyer sur de multiples symboles pour faire digérer aux spectateurs son propos. Certains sont plutôt intéressants, comme ce lotissement infini qui insiste sur le besoin  d’uniformisation que la société impose aux protagonistes. D’autres sont bien plus grossiers, telle la manière dont l’enfant est hypnotisé par la télévision: du déjà-vu.

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Pour peu que vous soyez parents, vous devriez tout de même vous reconnaître dans cette expression volontairement simpliste de la vie familiale. On pense notamment à la manière dont Tom creuse désespérément un trou dans le jardin, dans l’espoir de s’échapper, pendant que Gemma tente d’élever cet enfant bien étrange. On reconnaît derrière cette métaphore cette espèce d’idée vieillotte de l’homme au travail et de la femme au foyer. C’est plutôt bien exécuté, et la critique de la société est pertinente.

Mais un énorme souci va peser sur “Vivarium”. À l’instar de ses protagonistes, le film tourne complètement en rond à partir de la deuxième moitié de l’oeuvre. Évidemment, une certaine forme de répétition est voulue par la nature même de la critique sociétale du long-métrage. Mais plus aucune idée neuve n’apparaît à partir de 40 minutes: tout est déjà dit et Lorcan Finnegan, le réalisateur, se contente paresseusement de laisser vivre ses personnages. La routine, on la ressent, mais à force de ressasser ce procédé, le spectateur se lasse complètement de cette gigantesque métaphore. En un mot: Ennuyeux.

De plus, le cinéaste ne va pas proposer grand chose en terme de réalisation: il se repose quasi-entièrement sur son scénario et ses décors. Certes, cette immensité de maisons identiques et ces nuages aux formes semblables sont efficaces, mais on ne peut pas compter uniquement là-dessus pour que “Vivarium” devienne intéressant.

Pour ne rien arranger, Jesse Eisenberg est égal à lui-même: son jeu d’acteur monotone et barbant entache “Vivarium”. De mémoire de Réfracteurs, on n’a jamais vu l’acteur réussir à étaler une palette complète de sentiments dans un film. Ce qui fonctionnait dans “The Social Network” ne peut pas s’appliquer à toute une filmographie. Heureusement, Imogen Poots est elle bien plus brillante, nuançant subtilement son personnage tout au long de la pellicule. Mais, bien seule, elle ne peut sauver une œuvre en huis-clos qui ne comporte que trois personnages.

La vision de la pression sociale, nous la partageons avec le cinéaste. Mais “Vivarium” donne rapidement l’impression d’un film creux et longuet, et on se dit qu’un court-métrage aurait largement suffi pour étaler toute cette critique du modèle familial traditionnel.

Nicolas Marquis

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