The Gentlemen

2019

de: Guy Ritchie

avec: Matthew McConaugheyCharlie HunnamMichelle Dockery

L’exercice critique est parfois bien complexe. Il faut savoir apprécier avec un esprit constructif les qualités et écueils d’une oeuvre et de son géniteur. Funambulisme écrit, où le long-métrage est un fil et le critique l’équilibriste, avec pour seul filet son carnet à spirale et son critérium. Bien heureusement, il est possible pour celui qui veut s’y essayer de s’appuyer sur certains dogmes imposés par les génies du 7ème art, et sur certaines règles fondamentales. Parmi celles-ci, il en est une qui nous concerne directement aujourd’hui: Guy Ritchie est une bonne grosse feignasse!

Ha ça va tout de suite mieux en le disant, car tout dans “The Gentlemen” n’est qu’une resucée de ses films précédents, qui eux-mêmes portaient déjà une part de ce fardeau. Il n’y a pas plus malhonnête intellectuellement qu’un artiste qui copie un autre, mais quand le cinéaste se plagie lui-même, on confine aux horreurs de l’abysse cérébrale.

Drogue, chronologie éclatée, personnages stéréotypés et voix-off. Voilà comment résumer en une phrase la carrière d’un homme qui donnait l’illusion du talent à ses débuts et qui n’a jamais su se renouveler. Mais notre venin n’est pas gratuit, permettez-nous de développer un peu mieux pourquoi “The Gentlemen” est une arnaque pure et simple.

En voyant le parterre d’acteurs réunis, on pouvait pourtant entretenir de légers espoirs. Chacun d’entre eux, à l’instar de tous les autres comédiens, doit assumer une part douteuse de leur filmographie, mais d’ordinaire c’est une indication plutôt positive de voir un casting relativement attrayant. Encore faut-il que la partition qu’on leur impose soit bien pensée. C’est là le premier signe d’une descente aux enfers: ces personnages, Guy Ritchie nous les a déjà servis dans d’autres de ses films. “Snatch”, “Rock’n Rolla”, “Revolver” ou encore “Arnaques, crimes et botanique”, il arrive un moment où la formule “Ritchie” devient indigeste, encore plus quand il exacerbe les traits de caractère de ses personnages (quitte à égratigner quelques minorités) pour leur donner une fausse contenance. Dès les 15 premières minutes on sait exactement où “The Gentlemen” va nous embarquer, pour la simple et bonne raison que ce film, on l’a déjà vu.

« Matthew McConaughey est tranquillou pendant le confinement »

D’ailleurs, on ne vous fait même pas l’injure d’un résumé, l’ouverture du paragraphe précédent est suffisamment explicite. Guy Ritchie va y inclure toutes ses obsessions habituelles: la drogue, les kidnappings, les arnaques…Mince, voilà que nous aussi on s’auto-plagie. Redondant au possible, le scénario ne réussit jamais à décoller, malgré tous les artifices que le gars Guy tente. Bien sûr que l’avalanche de monologues donne de l’envergure aux personnages, mais une stature factice, putassière, que le long-métrage ne confirme jamais dans les actes. Le cinéaste tente bien de camoufler la misère avec une organisation tentaculaire de son scénario, mais qui n’apporte rien d’autre que de la confusion. Une surenchère perpétuelle qui sonne faux.

On n’enlèvera pas, par contre, au réalisateur son sens de la narration, du moins pas totalement. Son style reste distrayant, même si déjà-vu aussi, avec quelques rebonds sympatoches. Il réussit même deux ou trois propositions de réalisation nouvelles, comme ces plans au caméscope (nouvelles pour lui, entendons-nous bien). Tout cela, c’est de l’esbrouffe mais au moins “The Gentlemen” n’est pas ennuyeux. Malheureusement, on remarque rapidement que toutes ces petites choses ne servent qu’à masquer le vide titanesque d’un scénario qui tient sur un post-it. Quand en plus Guy Ritchie nous affuble de son éternelle voix-off pour compenser le manque de scènes bien pensées et faire trainer un peu plus son histoire, le constat est simple, et inutile d’aller plus loin dans la critique: Déjà fait, déjà vu, merci, au suivant !

Le film fonctionnera probablement sur ceux qui ne sont pas familiers du travail du réalisateur, ou sur les fans endurcis aveuglés par leur amour. Pour les autres, comme nous, inutile de se déranger, “The Gentlemen” n’est qu’une version ratée des précédents films de Guy Ritchie.

Nicolas Marquis

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