7500

2019

de: Patrick Vollrath

avec: Joseph Gordon-LevittOmid MemarAylin Tezel

Il est toujours intéressant de constater la récurrence de certains lieux sur lesquels le cinéma bute et s’attarde régulièrement, comme dans le cas présent l’avion avec “7500”. Des dizaines et des dizaines d’oeuvres de styles et de genres pourtant très différents semblent avoir emprunté l’appareil aérien pour catalyser et exacerber la tension. C’est mathématique: ce qui est terrible au sol est cent fois pire lorsque vous êtes en plein ciel.

« 7500 » cumule même les exercices de style puisqu’en plus de se dérouler dans un avion, c’est dans le cockpit exclusivement qu’on va vivre la tragique histoire: celle d’un détournement par un groupe de terroristes. Tobias (Joseph Gordon Levitt) est l’un des deux pilotes (et rapidement le seul) et il va devoir jongler entre les commandes de l’Airbus et les sommations des criminels prêts à toutes les atrocités pour que notre héros ouvre la porte scellée du poste de commande où il se trouve.

Cet exercice du huis-clos, “7500” l’accomplit avec un certain style et une cascade de rebondissements logiques. On ne parlera pas de réalisme total mais la grammaire que veut emprunter l’oeuvre est claire, tracée par de nombreux thrillers avant elle, et le film impose un enchevêtrement de montagnes russes émotionnelles qui fonctionnent tant que dure le long-métrage. On reste impliqué dans cette histoire.

D’autant plus que c’est l’occasion de retrouver Joseph Gordon Levitt dans un rôle fort. Lui qui se faisait si discret ces dernières années signe un retour sympathique avec ce personnage qui va traverser un large éventail d’émotions. L’affection qu’on avait pour le comédien reste inchangée malgré le temps qui passe et on adhère à sa performance.

Mais malgré toutes ces complexités, “7500” reste un film simpliste qui n’évolue que sur un degré, celui du thriller. Sortis de cette situation invivable, n’espérez pas trop de grandes réflexions métaphysiques. Est-ce vraiment un défaut en soi? Bien sûr que non, vous nous prenez pour qui? Nous aussi on savoure des bons gros films à suspens qui n’ont pas la prétention de révolutionner la philosophie moderne. Là-dessus pas de souci, sauf que…

« Pilotage incognito »

Sauf que “7500” exploite sa situation pour venir tirer des larmes aux téléspectateurs d’une manière assez visible. À deux ou trois reprises, le film va installer quelques artifices dans le seul but d’accentuer l’émotion. Cet escamotage qui devrait être invisible pour fonctionner est ici accompli avec rudesse et maladresse. Un peu comme si ces portions du récit étaient ajoutées à l’emporte-pièce.

Assez rapidement aussi, le film va être pris au piège de son format et de l’unité de temps qu’il impose: le long-métrage se déroule en temps réel. Si on a salué les rebonds intéressants, on est obligé de dire que leur timing n’est pas toujours le meilleur. On passe par de longues séquences où Joseph Gordon Levitt se contorsionne seul dans l’habitacle pour finalement continuer à dérouler l’histoire. À moins que la plastique de l’acteur vous hypnotise, ces moments peuvent faire chuter votre attention.

N’en reste pas moins un côté jouissif. L’angoisse de l’avion est tellement ancrée dans l’imaginaire collectif qu’on reste toujours intrigué par le fil narratif. C’est comme ça, nous aussi on a la pétoche dans les airs, comme tous les êtres sensés, et la catastrophe que vivent les passagers semble suffisamment contagieuse pour capter l’audience.

Efficace, mais pas assez pour excuser le manque de naturel du film. Trop schématique, trop académique, trop rectiligne, “7500” manque d’aspérités, de relief, pour parfaitement s’épanouir. Un peu moins de révérences et plus de courage n’aurait sans doute pas fait de mal.

7500” tient sa promesse initiale, celle d’une virée aérienne en enfer, mais n’accomplit rien de plus. Un divertissement un peu trop lisse.

Nicolas Marquis

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