Le talentueux Mr. Ripley

(The Talented Mr. Ripley)

1999

de: Anthony Minghella

avec: Matt DamonGwyneth PaltrowJude Law

Connaissez-vous “Plein Soleil” avec Alain Delon, sorti en 1960? Et bien saviez-vous que son rôle principal, tiré d’un roman américain, a été réutilisé au cinéma à plusieurs reprises? Aujourd’hui on s’intéresse à une de ses itérations les plus récentes avec “Le Talentueux Mr. Ripley”, sorti en 1999 et qui avait obtenu une belle exposition à l’époque grâce à son casting de luxe réunissant un parterre de stars sans pareil. Ça arrive de temps en temps, nos compatriotes sont plus prompts à dégainer une adaptation que nos voisins outre-Atlantique, et on peut apprécier une relecture de l’œuvre originale à travers un prisme bien différent. Enfin “apprécier”…

On suit donc les aventures de Tom Ripley (Matt Damon) qui suite à une série de malentendus va voyager jusqu’en Italie pour tenter de faire rentrer au bercail le très fortuné Dickie Greenleaf (Jude Law) au frais de son paternel désireux de le voir revenir. Mais arrivé sur place, Tom va éprouver une fascination plus qu’étrange pour Dickie et sa fiancée (Gwyneth Paltrow), et va s’incruster de plus en plus dans le quotidien du jeune bourgeois, jusqu’à le copier.

Dans les premiers temps du film, on est sous le charme. D’un côté, les paysages paradisiaques italiens, qui servent également à adresser quelques clins d’oeil à Fellini. Il est des lieux que l’on pourrait croire conçus pour le cinéma tellement ils s’intègrent bien dans le déroulé d’un film, et “Le talentueux Mr Ripley” l’a bien compris. Il n’hésite pas à en jouer avec respect.

Deuxième impression agréable, cet esprit un peu “Gatsby le magnifique”. En dépeignant la jeunesse dorée américaine, ici dans les années 50, le film gagne en consistance. C’est même un des axes de réflexions du film: d’un coté cette élite suffisante et méprisante, de l’autre Tom et son envie de devenir lui aussi un petit bourgeois.

Mais l’impression initiale ne saurait perdurer durant 2h: en vérité, le film tient bon tant que Jude Law, ici terriblement bon, est là. Dès lors que le film met son personnage en retrait, on a l’impression d’un château de cartes qui s’écroule. En face de lui, Matt Damon fait bien pâle figure et ne semble pas prédisposé à faire jeu (d’acteur) égal.

« C’est la merguez, merguez party! »

Le film se tire même une balle dans le pied en laissant les personnages féminins de côté alors qu’on pouvait totalement les imaginer plus présents. Gwyneth Paltrow est spectatrice du film, voire légèrement ahurie: on ne lui a pas réellement fait la place pour qu’elle puisse faire plus étalage de son talent.

D’ailleurs, la réalisation ne propose pas grand chose de très original. “Académique” on serait tenté de dire, mais ça ne retranscrirait pas correctement l’impression de fouillis qu’on a ressenti dans la deuxième partie. “Brouillon” semble bien plus approprié tellement Anthony Minghella, le réal, semble dépassé par l’enjeu de son histoire.

C’est cela le principal problème du long-métrage: tout ce qu’il amorce donne l’impression de mal se dénouer. Cet emballage si important dans le registre du thriller n’est pas au rendez-vous. Par moments chiant, par moments improbable, le cinéaste en fait bien trop en gesticulations et pas assez en profondeur.

« Le talentueux Mr Ripley” est en fait typiquement ce genre de film dont on se désintéresse car il en fait bien trop dans l’escalade. À force, les éléments du film se combinent bien mal et une impression de “too much” intervient avant même la moitié du film. Tout le reste, message politique y compris, s’en trouve parasité voir effacé.

Alors on ne saurait dire: soit le film en fait trop et mal, soit il ne va pas au bout de son idée initiale, celle qui se cachait assurément derrière le script. On aime nous aussi les thrillers légers par moments, mais c’est ici davantage qu’une simple occasion manquée: une forme de cinéma dépassé par son sujet et dont la manière ne restitue pas suffisamment l’idée philosophique qu’une telle histoire porte.

Alors clairement, “Le talentueux Mr Ripley” n’est pas non plus à vomir: il se suit plutôt bien. Mais il suffira de quelques minutes de réflexion pour voir poindre le spectre de la bancalité.

Nicolas Marquis

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