L’attaque des tomates tueuses

(Attack of the Killer Tomatoes!)

1978

réalisé par: John De Bello

avec: David MillerGeorge WilsonSharon Taylor

On était peinard, on discutait entre potes tranquillement quand tout d’un coup, des amis de vos Réfracteurs évoquent un film singulier (“à chier” d’après eux): “L’attaque des tomates tueuses”. Rien qu’au nom, nos oreilles se sont dressées, mais quand en plus ces comparses du jour nous ont gratifié d’une improbable bande-annonce, on a foncé, ni une ni deux, vers ce qu’on appréhendait comme un nanar. On vous le répète: on ne défie pas un Réfracteur innocemment. On rôde, toujours prêt à bondir sur un long-métrage que vous n’oseriez pas regarder pour le bien commun. Bonne nouvelle, le film du jour est moins pire que ce qu’on pensait (mais un navet tout de même).

Son résumé complètement con est dans le titre: du jour au lendemain, les tomates se mettent à se mouvoir et déciment la population américaine. Le gouvernement va envoyer une escouade absolument idiote pour tenter de désamorcer la situation alors que les fruits (oui, les tomates sont des fruits, fin du débat) deviennent de plus en plus gros et menaçants.

« L’attaque des tomates tueuses” est en fait une bonne grosse parodie bien idiote des films d’horreurs. Dès l’entame, le postulat est clair alors que le film évoque avec mesquinerie “Les oiseaux” d’Hitchcock. Rien d’effrayant donc mais plutôt de la bouffonnerie totale. Si vous êtes de fidèles lecteurs, vous savez sûrement qu’on est d’habitude relativement sévère avec les comédies, mais on se doit de vous faire un aveu: en général, plus c’est con, plus on aime.

Et débile, le long-métrage l’est totalement. Dans sa façon d’enchaîner les pitreries, on repense immédiatement à “Y a-t-il un pilote dans l’avion?” ou à la série des “Y a-t-il un flic…”: “L’attaque des tomates tueuses” est clairement dans la lignée de ces films qu’emmenait le formidable clown Leslie Nielsen, avec certes moins de talent mais un esprit similaire.

Cela tient sans doute au timing des gags qui s’enchaînent à rythme soutenu et agréable. Le rire au cinéma est souvent histoire de tempo, dans l’alternance entre moments forts et respirations. À ce jeu, “L’attaque des tomates tueuses” prend à la gorge pour ne pas vous lâcher. Alors vous n’allez pas vous tapez la cuisse tout le temps, le film ne fait pas mouche à chaque coup, mais le long-métrage affiche une savoureuse unité de ton.

« Bolognaise »

Parmi les procédés qui nous ont interpellé, il y a l’utilisation du hors-champ. Les tomates sont tellement grossièrement fabriquées qu’on ne peut jamais les voir manger un humain, et toute l’absurdité se lit sur les visages des protagonistes. Le film suggère et c’est le spectateur qui imagine l’insolite. Reste après le passage des funestes fruits une bonne dose de sang et de sauce tomate. Vous savez, quand vos parents vous disaient “N’aie pas peur, c’est du ketchup” devant un film un peu violent? Et bien là, on y est véritablement.

Autre méthode d’amener du rire dans un pitch aussi couillon: cette façon qu’a l’oeuvre (un grand mot, d’accord) d’exploser le quatrième mur. Des messages idiots cachés dans le générique de début, des faux bandeaux publicitaires en bas de l’écran… Régulièrement, le film se moque de lui-même avec une dérision sympathique même si parfois surfaite.

Mais le film se permet également de tacler avec beaucoup de loufoquerie les pouvoirs publics. Complètement dépassé, le gouvernement envoie sur place une escouade complètement ridicule et incompétente, composée de protagonistes tous plus foireux les uns que les autres. On ne bouleverse pas la société avec un tel film, mais on en rit volontiers.

Idem pour ce qui est de la communication et des médias. Le film prend un malin plaisir à ridiculiser les agences de pubs avec encore plus de mordant. On devine presque que les auteurs avaient des comptes à régler: c’est parfois excluant mais bien présent.

Mais “L’attaque des tomates tueuses” n’est pas irréprochable, et cette jolie cadence va complètement retomber dans le dernier tiers, beaucoup plus dirigiste. Le long-métrage met entre parenthèses sa grammaire pour nous conduire vers une conclusion téléphonée depuis le début, oubliant parfois d’être drôle (ou du moins de l’être efficacement). C’est un peu un soufflé qui retombe lourdement et qui vire à l’ennui après une entame réussie.

On ne vous conseille pas particulièrement le film, mais on a pu assouvir notre turpitude régulière d’exploration des œuvres improbables. 1h30 plutôt plaisante et suffisamment loufoque pour nous, mais également rapidement périssable.

Nicolas Marquis

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