The Villainess

(Aknyeo)

2017

de: Byung-gil Jung

avec: Ok-bin KimHa-kyun ShinJun Sung

Dans l’ombre des chefs-d’oeuvre universels du cinéma coréen, il existe toute une série de films de genre franchement prenant. Horreur, polar, comédie et autres: la grammaire cinématographique de la péninsule propulsée en avant ces dernières années s’applique à toutes les sortes de long-métrage et garde ce parfum jouissif et décomplexé propre au cinéma de ce pays. Nouvelle exemple aujourd’hui avec “The Villainess”: un film d’action sans limites et d’une efficacité redoutable.

Le scénario est presque accessoire: Sook-Hee (Ok-Bin Kim) est une tueuse froide et sans scrupule. Au terme d’un affrontement avec une des mafias coréennes dont elle ressort lourdement blessée, elle est récupérée par les services secrets qui n’hésitent pas à utiliser sa grossesse comme moyen de pression pour faire d’elle l’un de leurs agents.

Si on préfère prévenir de l’aspect presque inutile de cette histoire, c’est parce que le film lui-même ne semble pas en faire une priorité et assume son côté grotesque. On est ici dans l’action dynamitée et débridée et le reste importe peu, même si on constate avec plaisir la présence d’un rôle principal féminin fort, chose toujours rare dans ce genre cinématographique.

On serait à peu de choses près proche d’un “Nikita” coréen, tout juste suffisant pour tenir en haleine et imposer sa volonté de grandes scènes d’affrontement sans limites. Alors oui, si vous aimez les grandes histoires bien construites, passez votre chemin, à l’évidence. Mais pour ceux comme nous qui savent apprécier par moment des films sans prise de tête mais intelligemment mis en scène, savourez cette proposition.

D’autant plus que “The Villainess” multiplie les clins d’oeil totalement assumés avec délice. Tarantino et plus spécialement “Kill Bill” pour aller au plus évident, mais également “Oldboy”, “The Raid” ou encore “Infernal Affairs”: le film a bon goût dans ce domaine et on partage malicieusement la plupart de ses références. En somme, un long-métrage qui a conscience qu’il ne vit que par ses élans de bastonnade bien nerveuse et qui ravive quelques très bons souvenirs.

« Oracle à « La pagode de jade » »

Juger “The Villainess”, c’est donc avant tout jauger sa proposition dans l’action pure et dure. Ici, le contrat est rempli et même assez efficacement. Si là aussi quelques situations semblent un peu tirées par les cheveux, c’est pour donner place à des affrontements toujours plus dingues et grandioses. Et puis merde, au diable la cohérence, place au fun pour une fois!

D’autant plus que dans ses scènes d’action pleines d’adrénaline, le réalisateur Byung-Gil Jung avance tout un tas de propositions intéressantes. Pas toujours des nouveautés certes, mais une réappropriation de ressorts intelligente. On pense aux nombreux plans-séquence, qui ici ont en plus bien plus de sens cinématographique et d’astuce que certains exemples récents du genre, de part leur déroulement dans un espace clos. Également aux passages en vue subjective, pour souligner encore mieux la force de l’héroïne, ou encore des scènes de poursuite en moto où la cascade prime sur les effets spéciaux numériques. Le montage est probablement un peu perfectible mais on éprouve un réel plaisir à voir le film aller toujours plus loin.

Pour les plus cinéphiles, c’est même un jeu de réflexion, une énigme de mise en scène qu’avance le long-métrage. “Comment ont-ils fait pour tourner cette scène ainsi?” est une question récurrente dans “The Villainess”. Si on connaît la plupart des astuces pour étaler un “faux” plan-séquence, il n’en reste pas moins de nombreux moments où on sèche complètement. Cet effet, c’est un peu celui d’un magicien: vous cherchez le truc, focalisé sur le tour de passe-passe, et pourtant vous n’arrivez pas à le comprendre. Plutôt fort donc!

En dehors de l’action, la réalisation est un peu plus laborieuse. Son jeu chronologique perturbe un peu la compréhension et accuse un peu le coup. Ça n’empêche pourtant pas Byung-Gil Jung d’imposer des personnages charismatiques même si un peu “too much”. C’est l’esprit de “The Villainess” qui dicte cette volonté pour encore mieux offrir de la tension dans les scènes les plus explosives.

Complètement décomplexé et assumant totalement son aspect grotesque par moment, “The Villainess” est un plaisir malicieux, une bonne dose d’action survitaminée. Un film qui ne s’embarrasse de rien pour aller directement vers son but: toujours plus de panache dans les affrontements qu’il propose.

Nicolas Marquis

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