The Lodge

2019

réalisé par: Severin FialaVeronika Franz

avec: Riley KeoughJaeden MartellLia McHugh

Depuis quelques années, et de façon de plus en plus nette, une nouvelle école du cinéma d’horreur semble émerger. Dans la foulée d’Ari Aster ou encore Jordan Peele s’engouffre toute une génération de cinéastes qui ose bouleverser les codes d’un genre pourtant souvent balisé pour extirper un propos plus universel qu’il n’y paraît. “The Lodge” est clairement de ces films marqués par une envie de nouveauté et de consistance. Mais si l’intention est louable, l’exécution trouve-t-elle aussi un souffle nouveau? Réponse en quelques lignes.

Après le suicide de la mère de la famille Hall, marquée par le divorce qui frappe son couple, les deux enfants de la famille retournent vivre chez leur père et sa nouvelle épouse pour le moins étrange, sortie d’une secte dont elle est la seule survivante. À l’occasion d’un week-end dans le chalet familial, loin de tous, les événements paranormaux vont se multiplier dans ce logis anxiogène et le long-métrage va rapidement basculer dans l’angoisse absolue alors que les deux enfants sont isolés avec leur nouvelle belle-mère.

Le premier choc est visuel. “The Lodge” affirme un sens des lignes, de la géométrie et de la symétrie de l’image absolu. Chaque plan est réfléchi à l’avance et alimente l’impression claustrophobique de la pellicule. L’isolement n’est pas que géographique et cette notion des droites bien tranchées alimente la psychose ambiante. Nos héros ne sont pas que prisonniers des événements mais aussi de l’image, et c’est joliment fait.

C’est peut-être déjà là l’un des premiers points qui nous chiffonne pourtant. Cet esthétisme rappelle furieusement “Hérédité”. Passe encore le drame familial qui varie un peu son propos, mais impossible de ne pas penser lourdement au film d’Ari Aster dans la façon dont le long-métrage joue du parallèle avec une maison de poupée pour asseoir son cadre étouffant. “Hérédité” n’a pas le monopole de cette métaphore mais à si peu de temps d’écart, on sourcille.

« C’est sûr que vu comme ça, elle a l’air barjot. »

Pourtant, le fond de l’oeuvre est différent. “Hérédité” s’attardait sur une mère de famille au bord de la noyade, “The Lodge” ressemblerait presque à une suite où les survivants tentent justement de faire fit de l’absence maternelle. C’est la reconstruction familiale qui est mise à mal ici.

C’est d’ailleurs toujours intéressant de prendre du recul sur un film d’horreur pour réfléchir son propos. Si heureusement, “The Lodge” ne fait pas la critique du divorce, il n’en reste pas moins une oeuvre qui théorise la cellule familiale et tend à contredire une époque où la reconstitution des rapports entre enfants et parents serait bien trop facile. Nul n’est remplaçable chez les Hall, et cette mère qui disparaît dès le début n’est pas interchangeable avec la nouvelle conquête du père.

Dommage pourtant que le film joue autant de sa claustrophobie. Dans ce qui vire rapidement à un huis-clos, on se rappelle au souvenir récent de “Vivarium”, avec le même écueil: cette façon dont le film vire à la bouillie métaphysique passé un certain cap. On ne saurait fixer ce point de rupture précisément, il est variable selon chacun, mais arrive un moment où le long-métrage s’essoufle et où l’intérêt baisse proportionnellement, malgré toutes les bonnes idées de mise en scène qui émaillent “The Lodge”.

L’acting n’aide pas, et on prend tout spécialement en grippe ces enfants relativement mal dirigés. On est là face au syndrome habituel: si une partie du public se satisfait de voir des marmots pour s’émouvoir, vos Réfracteurs en demande plus niveau talent, et on est ici loin du compte.

Pour autant, “The Lodge” reste un film plaisant où l’horreur planante suffit à tenir en haleine. Certes, le long-métrage tourne un peu en rond, mais son ambiance lourde et mortifère suffit à nous permettre de passer un moment prenant. Peu original, mais ce que “The Lodge” accomplit, il le fait avec un certain talent.

Moment stressant, étouffant et prenant, “The Lodge” ne révolutionne pas le genre mais s’en accommode efficacement. Suffisamment pour remporter notre adhésion.

Nicolas Marquis

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