Gun City

(La sombra de la ley)

2018

de: Dani de la Torre

avec: Luis TosarMichelle JennerVicente Romero

Ce qui est chouette avec Netflix, c’est qu’on peut s’ouvrir au cinéma de tous les horizons. Ce qui est moins chouette avec Netflix, c’est qu’on risque de s’exposer au mauvais cinéma de tous les horizons. Car là franchement les potes, on a beau tourner le problème dans tous les sens, on ne voit pas comment sauver “Gun City” du naufrage dans lequel il s’est foutu.

Bon commençons par l’histoire. Envoyé de Madrid à Barcelone, au début du 20ème siècle, un inspecteur de police bien vénère va rapidement se retrouver sur une affaire étrange: un braquage de train et le vol de nombreuses armes qu’il transportait. Non content d’avoir les sourcils et la moustaches les plus fournis de la ville, l’inspecteur aux méthodes bien hardcore va semer le trouble dans une ville tiraillée entre le banditisme, l’anarchie et la corruption policière.

Et là on le dit de but en blanc: c’est con! Ha oui, ça c’est vraiment con de trouver un contexte géopolitique intéressant, peu exploité au cinéma et propice à plus d’un film original, pour en faire de la bonne grosse merde. Mais pour éviter cela, il aurait fallu s’y plonger directement, tête la première, même pas peur. Et ça malheureusement, c’est déjà trop pour “Gun City”.

Le film espagnol préfère se réfugier derrière des clins d’oeil mille fois trop appuyés (à Scorsese notamment) qui lui retire absolument toute son âme. Comme vous, on aime quand un film assume son bon goût et se permet quelques hommages, mais on ne peut pas ne jouer que de cela.

Le souci, c’est que pour le reste, “Gun City” est complètement incompréhensible. Enfin pas exactement, il est improbable comme pas possible au début, à tel point qu’en un maximum de 45 minutes on a perdu tout intérêt pour l’œuvre.

Un exemple concret: on l’a dit, le contexte de l’époque avec trois clans bien distincts (flics, anars et voyous) était intriguant. Sauf qu’en les présentant de manière très clivée au début du film, la porosité qu’il tente d’imposer ensuite ne fonctionne pas. Comme si tout le monde se détestait pendant la moitié du film, puis résigné, le réalisateur se décide à abattre le mur qu’il a érigé. Une vraie erreur de débutant, surtout niveau scénario pour le coup.

« Le gang des moustaches »

Mais on a pas pensé beaucoup mieux de la réalisation. On sent que le film a voulu mettre le paquet en reconstitution historique et cela va poser un double problème. D’une part, l’argent a été mal dépensé: fond vert baveux, décors en cartons, costumes pas top, etc… C’est foiré tout simplement. D’autre part, une fois tout ça dépensé, on dirait bien qu’il ne devait pas rester grand chose car le maquillage est presque drôle de nullité, et le casting à pleurer des larmes de sang.

Netflix semble d’ailleurs avoir compris qu’ils avaient un vague intérêt à mettre en avant les acteurs en dépit de leur performances, vu que deux d’entre eux sont également coupables de “La Casa de Papel”. Niveau qualité de comédiens, ça en dit long.

Mais même avec tout ce lourd fardeau à porter, on aurait dû pouvoir espérer de “Gun City” un très très vague cool en creusant un peu. Que dalle! Alors que le réalisateur Dani de la Torre réussit à proposer quelque chose visuellement dans des scènes entre couleurs noir et or, il n’arrive strictement jamais à aller au bout d’autre chose. Mention toute particulière à une scène de baston en plan séquence qui ressemble à un mauvais pastiche de la scène culte de l’affrontement de New York dans le premier “Avengers” mais en version prolétaire. Gênant.

C’est encore pire dans le fond de l’œuvre: aucune morale, aucune identification, et encore moins de message politique, le cinéaste fait sa couille molle pour ne surtout pas froisser de futurs exploitants. Si on gratte un peu la peinture, on se retrouve même face à une télénovela maquillée en western.

On a beau tourner ça dans tous les sens, on ne voit pas comment recommander un tel navet. Le contexte politique de l’époque interpelle forcément, mais “Gun City” est factice: un faux film noir, un faux western, un faux plaidoyer politique, mais une vraie purge.

Nicolas Marquis

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