(Candyman: Day of the Dead)
1999
Réalisé par: Turi Meyer
Avec: Donna D’Errico, Tony Todd, Jsu Garcia
En guise d’intro, une devinette: qu’est-ce qui est pire que le deuxième volet raté d’une saga cinématographique qu’on apprécie? Un troisième opus encore plus consternant de bêtise. Alors qu’on vous avait communiqué notre amour pour le premier “Candyman” en podcast, et une forme de dédain pour sa suite (cette fois à l’écrit), nous ne savions alors pas encore que “Candyman 3 – Le jour des morts” allait repousser les limites de l’acceptable pour les spectateurs sains d’esprit. Outre le fait de mépriser l’œuvre originale, notre film du jour semble perpétuellement s’évertuer à maltraiter cérébralement son public en s’enfonçant toujours plus dans la lie du 7ème art et en s’y vautrant paresseusement. Alors que tous nos espoirs reposent désormais sur le remake de Nia Da Costa, on ne résiste pas à vous partager cette chronique d’un naufrage.
Pour le scénario, on va faire simple: c’est à très peu de choses près le même que le deuxième épisode, en encore moins cohérent. On quitte la Nouvelle-Orléans pour gagner Los Angeles et plus particulièrement les quartiers latino alors que se préparent les célébrations du “Jour des morts”. Au milieu de l’ébullition qui gagne la ville, le mythe du Candyman fait toujours parler de lui et terrorise les endroits les plus reclus de la cité. Pour y faire face, on va suivre Caroline (Donna D’Errico), la fille de l’héroïne de “Candyman 2” désormais orpheline et hantée par le terrible tueur au crochet, son arrière-arrière-grand-père.
N’allez donc pas chercher trop loin l’originalité, “Candyman 3” se contente de troquer le Mardi Gras du film précédent pour le “Dios de los Muertos » dans une explosion incontrôlée de clichés qui ferait passer “Coco” pour un documentaire. Un contexte social qui permet peut-être à la saga de renouer plus fortement avec ses thématiques sociales qui formaient le socle de “Candyman” quand on sait le racisme endémique qui frappe les latinos aux USA? Oui, sans aucun doute, mais ce nouveau long métrage tente de le faire lourdement avec tout le mépris possible pour la subtilité et la force de suggestion du premier film. Le réalisateur et coscénariste Turi Meyer, dont c’est heureusement l’un des seuls crimes envers le cinéma, se sent obligé de nous offrir une personnification de ce mal très américain à travers un policier patibulaire et profondément xénophobe.
De là vont découler deux problèmes: le premier, c’est la partition qui est offerte à Wade Williams pour camper ce flic. On ne doute pas du racisme profond d’une partie des forces de l’ordre, mais c’est ici restitué avec tellement de gratuité qu’on finit par croire que notre officier de police souffre perpétuellement d’hémorroïdes qui le rendent irascible. Le deuxième souci, c’est le manque flagrant de courage de Turi Meyer: le metteur en scène ne va même pas au bout de sa démarche puisqu’il contrebalance cet antagoniste avec un autre flic, lui complètement béat de naïveté. Quand dans le même temps on retire presque tous les axes du récit consacré à la pauvreté, on comprend que “Candyman 3” ne sera qu’un banal slasher créé sur l’autel du mercantilisme.
Pourtant, qu’il aurait été doux de voir un Turi Meyer simplement absent et dilettante… Mais non! Le cinéaste signe son crime de sa caméra. Outre une avalanche de CGI tous plus consternants les uns que les autres (faites-vous du mal en voyant les abeilles envahir la ville dans le générique d’intro à travers une dégringolade de saccades), Turi Meyer va enfoncer un peu plus la tête de son film sous l’eau à travers ses artifices de mise en image pitoyables. On pense tout particulièrement aux scènes de visions de Caroline que le metteur en scène accompagne en ouverture et en fermeture d’un flash lumineux grotesque et d’un effet sonore assourdissant. “Candyman 3” tire à balles réelles sur la retenue, à tel point que les mises à mort sont vécues comme un véritable soulagement plutôt que comme des instants angoissants.
Il faut bien dire en même temps qu’avec le casting proposé, on allait pas vraiment s’aventurer dans la profondeur: si Tony Todd livre une prestation à peu près égale à ce qu’il nous offrait dans les deux premiers films, même si elle est ici contrariée par la mise en scène, que dire du manque de talent total de Donna D’Errico. Alors certes, on a très peu d’attente venant d’une actrice de “Alerte à Malibu”, mais de là à surjouer la moindre émotion et à hurler pour un oui ou pour un non, il y a une marge que la comédienne franchit allègrement. Ce n’est pas la passion de Turi Meyer pour la filmer en culotte et débardeur qui nous empêchera de le constater. Mais en même temps, pourquoi se fouler? Quand le film fait prendre 25 ans à son personnage sur un laps de temps qui ne dépasse pas les 5 printemps, à quoi bon chercher l’intelligence de toute façon annihilée par les dialogues effroyables? Le film part suffisamment en vrille dans tous les sens pour que Donna D’Errico saisisse qu’elle a fait un mauvais choix dans sa carrière. Mention toute particulière pour une scène où Caroline se roule en boule dans sa baignoire, une belle mise en abîme du ressenti du spectateur.
« Mise en abime. »
Toutefois, on a peut-être finalement rien compris à “Candyman 3”, lui qui décide de briser le quatrième mur: les victimes ne sont pas à l’écran mais dans la salle, et le tueur n’est pas le Candyman mais plutôt Adam Gorgoni qui signe la bande originale. Entre boîte à rythme évoquant les grandes heures du porno et incantations indiennes complètement hors de propos, son générique de début est le témoignage d’un esprit dérangé qui devrait se reconvertir dans un domaine où il ne torturera personne malgré lui.
Alors que retenir de ce nouveau “Candyman” avant le remake qui débarque bientôt? Outre le traumatisme qu’ont vécu notre ouïe et notre vue, le film n’est jamais que le témoignage d’une époque où le cinéma d’exploitation n’a jamais aussi bien porté son nom. Dans toutes les strates de son élaboration, le long métrage fait le choix de la facilité pour vomir une proposition qui a tout du film simplement là pour tenter d’effrayer les jeunes ado, sans réel fond. Finalement, après un deuxième épisode pas bien meilleur, on se dit que si Nia Da Costa reboot presque le tout, on sera peut-être gagnant. Mais s’il y a bien une chose que “Candyman 3” nous a appris, c’est de ne jamais espérer.
Non content de pomper allègrement un deuxième épisode déjà lamentable, “Candyman 3” affirme une idiotie latente qui montre un manque de respect flagrant pour son public.