2020
de: Kenneth Branagh
avec: Ferdia Shaw, Lara McDonnell, Josh Gad
Même si la réouverture se précise sous nos latitudes, une bonne partie des salles de cinéma du monde reste désespérément fermée. Dans ce contexte, une vraie guerre sans honneur ou humanité se livre entre les géants de la SVOD. Netflix n’hésite pas à dégainer ses exclusivités à tour de bras, imité par Disney+ qui continue de creuser son trou. Pas étonnant donc de voir la firme répondre à la sortie du dernier Spike Lee chez Netflix avec une exclusivité sortie du fin fond du tiroir le plus poussiéreux: le déplorable “Artemis Fowl”.
Le long-métrage propose de plonger dans l’univers le moins attachant au monde, celui du jeune Artemis Fowl, fils d’un célébrissime voleur (d’ailleurs tout le monde sait où il habite, que fait la police?) qui disparaît un jour mystérieusement. Pour le retrouver, Artemis va découvrir le monde des fées et autres créatures mystiques irlandaises pour sauver son paternel, et l’univers des petits êtres magiques au passage.
Pour accrocher un peu le spectateur, un minimum de proposition graphique n’aurait pas été de trop. Ici, le film utilise décors en 3D moches et costumes tout en plastique sans âme. Impossible de s’attacher à un monde avec aussi peu de relief: tout sonne faux, fabriqué, prémâché.
Le film ne peut même pas se targuer de la moindre originalité scénaristique, tellement il utilise la structure rincée de la quête par l’objet. Un artefact à découvrir et que tout le monde s’arrache pour percer des mystères ancestraux à jour: c’est du mille fois vu et revu.
Puis viens le problème du casting. Essentiellement enfantin, on aurait tendance à le trouver sympathique si on avait une once de pitié dans le coeur. Mais hop hop hop! Pas si vite! Vous êtes chez Les Réfracteurs ici, pas de langue de bois. On te juge que tu aies 7 ou 77 ans . Et dans le cas qui nous intéresse aujourd’hui, saches cher Ferdia Shaw, toi qui incarne le rôle titre, qu’on te trouve bien mauvais. Apparemment on est pas les seuls puisqu’on a eu la bonne idée de réduire au montage tes interventions au minimum, mais tout de même: change de vocation, tout de suite!
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En réalité on est un peu dur, le marmot fait de son mieux dans une absence de contrôle des interprètes quasi-totale. C’est frappant lorsqu’on voit Judi Dench, dont on connaît le talent, tenter de se départir de son costume miteux de fée. “Artemis Fowl” manque de personnages intéressants.
Alors évidemment, vous avez devinez maintenant qu’on a pas franchement apprécié le voyage proposé par le film. Ok. Mais quand “Artemis Fowl” ne se respecte pas lui-même en proposant une fin incroyablement vite expédiée alors que tout le reste de l’oeuvre accusait un rythme lancinant, on pète un plomb. En deux coups de cuillère à pot, on règle tous les problèmes et chacun rentre chez soi, heureux, sauf le spectateur.
Enfin tous les problèmes, pas réellement, et là on va pousser un coup de gueule généralisé, qui s’applique à toute l’industrie et donc pas uniquement à “Artemis Fowl”: il faut arrêter ces films qui sont plus soucieux de teaser un deuxième épisode plutôt que conclure efficacement leur travail en cours. C’est insupportable et ça n’a presque jamais fait de bon film. On en peut plus de ces questions qui reste en suspens pour vaguement nous accrocher, ça ne prend plus. Faites donc votre travail, finissez-le et on verra le reste plus tard, mais écoutez la bonne parole: d’abord un film, le reste après. Arrêtez de croire qu’on peut imposer une licence au pied de biche, c’est irrespectueux pour vos spectateurs.
De quoi frémir tout de même, car si l’avenir de Disney+ s’écrit avec ce genre de projet, on est tellement crispé d’avance que nous aussi on affiche un sourire Colgate éclatant, mais c’est plutôt parce qu’on grince des dents.
En essayant de faire plaisir à tout le monde, “Artemis Fowl” ne contente personne. Les plus grands aspireront à des œuvres plus fouillées alors que les plus jeunes n’accrocheront pas devant cet univers complètement factice.