Planète terreur

(Planet Terror)

2007

réalisé par: Robert Rodriguez

avec: Rose McGowanFreddy RodriguezJosh Brolin

Alors que pour certains Halloween est synonyme de déguisement et de sucreries, pour les Réfracteurs, la fête rime avant tout avec films, films, films et encore plus de films! Alors qu’on égrène quelques unes de nos oeuvres horrifiques préférées dans des styles très variés, on vous propose de vous pencher aujourd’hui sur le sanglant, le purulescent, l’abominable “Planète Terreur”. Un long-métrage rempli d’amour pour le gore mais aussi d’un certain second degré. Prévu pour être distribué à la base en tandem avec “Boulevard de la mort” de Tarantino, le film de Robert Rodriguez a eu l’honneur d’une sortie solo en salles sous nos latitudes et tant mieux! Le film se suffit parfaitement à lui-même.

Dans cette lettre d’amour aux films d’horreur des 80’s, on va suivre Cherry (Rose McGowan) et Ray (Freddy Rodriguez), deux anciens amants qui vont être réunis lorsqu’une apocalypse zombie frappe leur bourgade typique du Texas. Le couple et les habitants vont lutter pour leur survie dans une avalanche de bidoche décomplexée.

Tout dans “Planète Terreur” pue l’hommage aux oeuvre cultes du genre, et c’est omniprésent à l’écran. Que ce soit des choses très visuelles, comme un décor de station-service qui rappelle “La nuit des morts-vivants” ou des éléments scénaristiques, comme la trajectoire de Dakota (Marley Shelton) qui sombre dans les affres de l’horreur, le film nous enveloppe perpétuellement dans une douce couverture kitsch et savoureuse.

Mais c’est aussi parfois une révérence plus implicite qu’avance Robert Rodriguez: prenez la présence à l’écran de Tom Savini par exemple, maquilleur génial de nombreux longs-métrages angoissants et qui fait ici quelques courtes apparitions, ou bien la musique de Robert Rodriguez lui-même qui émule régulièrement les sonorités des OST de John Carpenter. Le cinéaste est totalement conscient de son mélange et propose de restituer son amour avec beaucoup de sincérité.

Et il va le faire dans une débauche gore totale qui pourrait faire passer “Planète Terreur” pour un plaisir coupable s’il ne s’assumait pas autant. Chaque incohérence semble calculée pour se rapprocher du cinéma d’exploitation de la grande époque, ces films de genre à petit budget mais grands litres d’hémoglobine. Le long-métrage peut braquer certains, mais pour les autres il est jouissif, malicieux et drôle à la fois. “Planète Terreur” est généreux.

« Prenez ça les pirates! »

L’affection de Rodriguez pour les 70’s et 80’s est aussi très visuelle, dans la patte graphique qu’il insuffle à son oeuvre et qui imite les bobines usées de l’époque, ou dans sa volonté de compter davantage sur des trucages concrets que sur du numérique. Le réalisateur épouse les codes de l’époque mais pour les propulser à notre ère sans tomber dans le sentimentalisme exacerbé.

Sa mise en scène épouse la même pratique. Chaque attente du spectateur est récompensée par une nouvelle séquence qui séduit les fans décomplexés devant tant de sincérité. Un peu de dialogues toujours tranchants, un peu d’action, beaucoup de punch: Rodriguez ne souffre d’aucune limite et se moque des pisses-froids.

C’est aussi particulièrement voyant dans la façon dont il va jouer presque interactivement avec le spectateur, en proposant par exemple une fausse bande-annonce au début du film (qui deviendra véritable mais c’est une autre histoire), ou en faisant le coup de la bobine manquante à un instant savamment choisi, imposant une ellipse incompréhensible sur le coup. Le réalisateur explose le quatrième mur pour trouver une dimension supérieure.

Ce qu’il y a de saisissant dans “Planète Terreur”, c’est aussi la manière dont le casting, composé de quelques grands noms, accepte de se plier à cet exercice très singulier. Derrière Rose McGowan, paraît-il embauchée pour emmerder Harvey Weinstein, on retrouve par exemple Bruce Willis dans un rôle archi-caricatural mais terriblement bien inscrit dans le scénario. Tout le monde s’amuse autour du long-métrage, y compris les acteurs.

Enfin, et c’est important à cette époque, sans chercher à en faire trop et sans être une œuvre d’émancipation, “Planète Terreur” offre quelques rôles féminins intéressants, de femmes fortes ou tout du moins confrontées à des épreuves dures et qui s’en sortent malgré tout. On le répète, pour une prod Weinstein, Rodriguez semble ne pas s’être embarrassé du dictat du pervers en chef, et tant mieux pour tous!

Planète Terreur” ne peut pas parler à tout le monde: il faut avoir été biberonné au cinéma de genre depuis tout gosse. Mais merde! Pour nous, c’est un plaisir qu’on refuse de bouder!

Nicolas Marquis

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