(Die Fälscher)
2007
réalisé par: Stefan Ruzowitzky
avec: Karl Markovics, August Diehl, Devid Striesow
À découvrir dans le cadre du festival « Vision d’Histoire » au cinéma « Caroussel » de Verdun, le samedi 17 octobre 2020 à 14h
Chaque année, le festival “Vision d’Histoire” de Verdun est l’occasion de (re)découvrir quelques grands classiques sur grand écran. 2020 ne fait pas exception, notamment marqué par plusieurs chef-d’œuvres de Stanley Kubrick. Pour autant, le festival n’oublie pas le cinéma moderne et à chaque édition, un film méconnu des dernières années a le droit à un nouveau coup de projecteur. Cette année, “Les faussaires”, sorti en 2007, est l’un des films les plus récents présentés au Caroussel de Verdun.
Une histoire poignante au premier degré: celle de Sally, un faussaire de génie qui va être déporté pendant la Seconde Guerre mondiale. Arrivé dans les camps de la mort, il va mener à bien l’opération Bernhard, un large trafic de faux billets censé couler l’économie des alliés en inondant les pays de faux billets. Contraint de collaborer pour survivre, Sally va tenter de jongler avec ce dilemme.
C’est en chorale que toute cette contradiction va être amenée. Sally n’est pas seul mais dirige un large groupe de prisonniers, tous plus ou moins enclins à collaborer. Certains sont prêts à mourir pour refuser d’obtempérer alors que la trouille gagne les autres. Ce paradoxe infernal infligé aux prisonniers fonctionne, on partage cette problématique.
Individuellement, Sally se distingue aussi. Karl Markovics nous propose une interprétation pleine de flegme. Son personnage est un taciturne débrouillard dont le sang froid impressionne. Un héros qui apparaîtrait presque cool si les circonstances environnantes n’étaient pas aussi macabres. Il est lui aussi en parfait équilibre entre le besoin de survivre et l’envie de protester.
Plus grossiers nous ont semblé les geôliers allemands. Leur psychée est plus manichéenne et on est pas loin de les surprendre en train de manger de la choucroute et descendre des bières entre deux scènes. On exagère un peu mais le film ne propose pas de vraie substance dans ces personnages qui sont réduits à leur plus simple expression.
« À nouveau dans l’horreur des camps avec le festival. »
C’est que le film se repose parfois sur une réalisation surfaite. Les symboliques sont un peu éculées, les status quo déjà vus, et plusieurs personnage empruntent aux cadors du genre. “Les faussaires” ne réinvente pas une recette connue et se l’approprie tout juste, probablement prisonnier dans le carcan de “l’histoire vraie”.
Le budget semble avoir aussi été un problème quand on observe attentivement les décors. Leur rendu laisse à désirer, on est loin de la reconstitution parfaite. Une vraie tuile alors que le film fait le pari de n’offrir qu’extrêmement peu de scènes extérieures pour appuyer le sentiment d’oppression. Immédiatement, les limites financières apparaissent.
On préférera retenir le dilemme moral des forçats, bien plus consistant. Cette entente de personnages aussi divers pour survivre, alors que leur mission cause des pertes chez leur allié fonctionne tant bien que mal. On assimile pleinement la problématique et on s’interroge: “Et si c’était moi?”
En offrant un panel très large de personnages à différents degrés de l’éventail entre collaboration et rébellion, le film réussit à nous embarquer. En plus de Sally, d’autres personnages nous marquent, nous agacent, nous attristent, nous convainquent parfois. Réfléchir à ces horreurs inhumaines est déjà une réussite.
“Les faussaires” n’est pas une réussite totale mais ce coup de projecteur du festival “Vision d’Histoire” nous aura permis de découvrir un film qui aide au cheminement intérieur de chacun.